Proposition d'apprendre une langue dès 3 ans en France

Publié le par être parent tout simplement

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 Le Monde.fr | 23.01.11 |

Mon commentaire : Pour rappel, pour ceux qui n'étaient pas encore au courant, le ministre de l'éducation a profité de sa visite à Expolangues, mercredi 2 février à Paris, pour préciser un peu son projet sur l'apprentissage des langues dès 3 ans. Il est revenu sur trois points qui faisaient polémique. D'abord, il a effacé de son discours la notion d'"enseignement précoce des langues", le remplaçant par une "sensibilisation". Le deuxième point contesté était l'idée d'un développement de cet "enseignement-sensibilisation" via les nouvelles technologies. Le ministre s'est donc interrogé sur l'idée de "solliciter l'intervention de professeurs d'anglais du secondaire" pour assurer cette initiation en première année de maternelle. Le dernier motif de critique portait sur la confusion ministérielle entre enseignement des langues et enseignement de l'anglais. Luc Chatel a rappelé à Expolangues que "cet apprentissage [de l'anglais] n'est ni limitatif ni exclusif des autres langues".A quand des questions de fond sur la qualité accordée à cet apprentissage ? Qui va poursuivre l'apprentissage en suivant (CP, CE2) ?

 

 

 

"Je veux réinventer l'apprentissage de l'Anglais dans ce pays". Invité du Grand Rendez-vous d'Europe 1 - Aujourd'hui en France, le ministre de l'éducation, Luc Chatel a annoncé, dimanche 23 janvier, la mise en place dans les jours prochains d'"un comité stratégique sur l'enseignement des langues, pour que nous réfléchissions à un apprentissage dès trois ans … Nous l'expérimentons ici ou là et avons de bons résultats", a-t-il ajouté.

Que ceux qui s'attendent à voir affluer des masses d'enseignants et autres intervenants spécialisés en langues, ne se réjouissent pas trop vite. Le ministre qui "veut réfléchir à l'usage des nouvelles technologies", a annoncé qu'il allait demander au Centre National d'enseignement à distance, le CNED, de "développer un outil d'apprentissage à distance de l'anglais". Il a par ailleurs rappelé son souhait qu' "à 18 ans les lycéens aient tous fait un séjour à l'étranger".

"MY ENGLISH TEACHER IS A COMPUTER, ISN'T HE ?"

C'est vrai qu'en langue vivante, la France ne brille pas. Fin 2008, les 20 000 étudiants français qui avaient passé le Toeffl — Test d'anglais comme langue étrangère — ont obtenu un score moyen de 88 sur 120. Un score qui nous place au même rang que la Bulgarie, la Biélorussie ou la Lettonie, alors que les Allemand et les Néerlandais arrivent, eux à un score moyen de 108.

Si la marge de progrès est importante, reste à se demander si la voie empruntée est la bonne. A la prochaine rentrée les 1000 intervenants en langues disparaissent du budget de l'éducation. C'est-à-dire la quasi intégralité des ces personnels spécialistes de l'enseignement de la langue de Shakespeare. A titre d'exemple, dans la plus grande académie de France, celle de Versailles, le recteur a annoncé mi janvier que sur les 120 postes qu'il devait supprimer dans le premier degré, 75 concerneraient ces intervenants en langues vivantes. Une coupe qui ne se voit pas trop au premier coup d'œil puisqu'elle n'oblige pas à fermer des classes.

"Installera-t-on les enfants de trois ans devant un ordinateur ?" s'interroge Christian Chevalier, le secrétaire général du Syndicat des enseignants (SE-Unsa). "Nous ne sommes pas opposés au développement d'outils d'enseignement. Mais un travail pédagogique doit être mené par un humain. Et ce n'est pas parce qu'un enseignant du premier degré parle l'anglais qu'il est capable de l'enseigner", ajoute-t-il. "Et puis quand Luc Chatel nous dit que ses expérimentations d'enseignement de l'anglais à trois ans marchent bien, j'attends des données chiffrées. N'oublions pas qu'elles ne sont en place que depuis quatre mois… En fait je crois surtout que le ministre qui doit faire face à une forte montée de la contestation, cherche à détourner le regard des parents des classes qu'on est en train de fermer, des options qu'on supprime et des classes qu'on est en train de surcharger pour faire face à la baisse draconienne des moyens".

La proposition ne satisfait pas plus Sébastien Sihr, secrétaire général du SNU-ipp, le premier syndicat du primaire. "Avant de lancer une annonce, Luc Chatel ferait mieux de s'assurer que l'enseignement des langues, qui doit normalement être effectif dès la classe de CE1, l'est vraiment." Depuis la réforme des programmes de 2007, en effet, 54 heures annuelles de langue vivante sont prévues du CE1 au CM2. "Est-ce qu'il va modifier les programmes pour introduire cet enseignement précoce ? On n'en sait rien. Et puis son annonce me laisse dubitatif sur sa conception de l'école maternelle." Le SNU-ipp qui défend les spécificités de ces premières années de socialisation et d'apprentissage de la langue française, n'a pas envie de voir la petite école changer de nature. Une tentation qui se fait déjà sentir ici ou là.

Maryline Baumard

Publié dans EDUCATION NATIONALE

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